lundi 28 octobre 2013

LA FIAC, UNE FOIRE À DEUX VITESSES ?

40ème édition de la FIAC, Foire Internationale d'Art Contemporain sur laquelle souffle un vent d'optimisme car Paris semble avoir retrouvé une place éminente en matière d'art contemporain, tant pour la création que pour le marché, devant les places américaines ou japonaises.



  • Un Grand Palais "sanctuarisé" ?
Pour reprendre un adjectif très souvent utilisé au sujet de l'école (qui, soit dit en passant, est laïque !) le Grand Palais est devenu le Saint des saints réservé aux élus, encore nombreux, je le reconnais, qui peuvent débourser 35 euros : la sanctuarisation par l'argent, les marchands du Temple ont encore de beaux jours devant eux.

  • La FIAC hors les murs
Pour les badauds, le vulgum pecus, plusieurs lieux prestigieux, sont accessibles gratuitement et pour encore quelques jours, comme le Jardin des Plantes et le Jardin des Tuileries, le site Internet de la FIAC permet une première approche des œuvres exposées, venues du monde entier. En dehors de nos appréciations personnelles, on peut s'interroger sur les possibilités réelles de jeunes artistes pour tenter d'exister dans cette nébuleuse mondialisée où quelques étoiles attirent les regards au milieu d'une myriade de grains de poussière... La problématique est assez proche pour les galeristes. C'est là que le collectionneur intervient, poussé par une réelle passion qui le guide dans ses choix et lui fait prendre des risques mais c'est là aussi qu'intervient le spéculateur ou le frimeur qui veut acheter, cher et coté.

Parmi les lieux prestigieux, la place Vendôme offre son cadre somptueux et minéral aux cabanes de Tadashi Kawamata.
Né en 1953, dans le nord du Japon, Kawamata accède à la scène mondiale dans les années 1980, en particulier après sa première invitation à la biennale de Venise en 1982.
Après des études de peinture, il a commencé à utiliser le cadre de bois de ses toiles comme matériau de ses créations et à les exposer en tension entre l'intérieur et l'extérieur ouvrant ainsi de nouveaux espaces de déconstruction puis de reconstruction. Il s'inspire aussi des abris précaires des SDF et de leur place dans l'espace urbain et les installe dans des lieux difficilement accessibles comme des arbres, donnant ainsi une autre dimension à cette thématique de l'abri. C'est ce type d'œuvre qui a été installé sur la colonne Vendôme.


Comment apprécier et évaluer une œuvre de ce genre ? Quelles sont ses qualités intrinsèques ? Comment percevoir la qualité et la validité de ce travail ? Comment le coter et justifier cette côte ? On perçoit dans le parcours de Kawamata une cohérence, une rigueur qui traduisent l'exigence de l'artiste : par ses installations, ses créations, il se confronte au monde en le déconstruisant puis en tentant de le reconstruire. Il modifie notre lecture de l'espace pour nous introduire dans son univers. Une des clés pour non pas comprendre, - ce serait présomptueux - mais s'approcher de l'art contemporain réside peut-être dans l'idée qu'il faut aller par delà l'œuvre elle-même pour trouver une parcelle de la vérité de l'artiste.

Cette installation de la place Vendôme me rappelle les pratiques de certains ermites des premiers siècles du christianisme : les stylites qui restaient perchés sur leur colonne indéfiniment pour se consacrer à la prière. Le plus célèbre d’entre eux, Siméon le Stylite, avait érigé sa colonne dans le désert syrien, pas si désert que ça, et y était resté quarante années mais avec quelques petits aménagements en particulier pour l'évacuation des "eaux usées" et pour l'empêcher de tomber quand il dormait ! Et comment y monter ? Kawamata a sans doute la réponse quand il se décrit comme un oiseau migrateur qui va et vient d'un nid à l'autre, chaque année.

www.fiac.com

lundi 21 octobre 2013

OPEN SPACE : GLOSSOLALIE COMIQUE




Glossolalie : Phénomène extatique, constaté dans de nombreuses religions et sectes religieuses anciennes et modernes, dans lequel le sujet émet une série de sons ou de mots dont les auditeurs ne peuvent saisir le sens sans le concours d'un autre sujet possédant le don de l'interprétation.
Petit Larousse

Soit un espace de bureau, sept bureaux plus de la première jeunesse, des écrans et claviers d'ordinateur, des armoires, une machine à café... un bureau comme il en existe des milliers, en "open space" en bon français, c'est-à-dire que chacun profite pleinement de l'activité de ses voisins et néanmoins collègues. Dans le fond de la scène une double porte d'ascenseur qui va donner le passage à six comédiens (trois hommes, trois femmes) et c'est parti pour une journée de travail.
Sans dialogues compréhensibles mais modulées autour de quelques mots qui surgissent ça et là, les situations s'enchaînent sur un tempo soutenu où le langage des corps vient compléter et renforcer le langage oral. On y retrouve les archétypes de cette vie de bureau, où les relations humaines sont si importantes que chaque petit événement prend une place considérable du futile au drame.
Un spectacle plein de vivacité, de rythme où Mathilda May mêle avec bonheur et humour différents genres pour arriver à cet équilibre pour notre plus grande joie !

Le spectacle part en tournée mais reviendra ensuite vers la région parisienne, donc à ne pas manquer.
Plus d'informations sur le site du Théâtre Jean Vilar.


Un antécédent inoubliable... Les Temps modernes

jeudi 17 octobre 2013

ASTÉRIX À LA B.N.F.

De la validité de l'utilisation de bonnes BD pour construire son cours d'Histoire des Arts


Quand j'ai commencé l'option HIDA il y a quelques années en Seconde, le programme couvrait, en toute modestie, l'architecture et l'urbanisme en France de l'époque gallo-romaine jusqu'à la Révolution industrielle.

Dans ces temps préhistoriques où la diapo et le projecteur régnaient encore en maîtres, l'introduction de la BD comme support valable et scientifiquement acceptable d'un cours semblait encore lointaine. Mais déjà, dans des temps, eux, protohistoriques, la digne demoiselle qui était notre professeur de Latin, nous avait encouragés à lire Astérix légionnaire pour illustrer certains aspects de La Guerre des Gaules car Jules César n'avait pas pensé aux illustrations !

Alors, si vous voulez savoir comment les Romains réalisaient des routes, plongez dans Astérix en Corse ; pour des monuments promenez-vous avec Le Tour de Gaule et surtout gallo-pez à la BNF !

MARCHÉ DE L'ART, MARCHÉ DE DUPES ?

Quand Banksy déambule à New York



Banksy, originaire de Bristol au Royaume-Uni, est une des figures du street art, installé actuellement aux États-Unis. Sa notoriété, dans les milieux alternatifs, vient paradoxalement du fait que l'on ignore sa véritable identité, qu'il délivre un message subversif mais qui n'est pas dénué de poésie ni d'humour.


Ce jeune artiste (né en 1974?), utilise la technique du pochoir pour animer les murs de la ville (urban art) de ses personnages, célèbres ou non, humains et animaux et procède aussi au détournement d’œuvres célébrissimes comme celles de Van Gogh ou Monet.
Il y a 48 heures, à Central Park, un homme d'apparence âgée, vendait des pochoirs de Banksy 60$ pièce alors que ceux-ci sont estimés 160 000$ chacun ; il en a vendu 8 !!


Ses interventions quotidiennes durant le mois d'octobre à NY sont visibles sur un site Internet dédié.
Allez-y, cela vaut le détour.
www.banksyny.com

Sources : Wikipédia, Connaissance des arts et www.banksy-art.com

jeudi 10 octobre 2013

TÊTES COURONNÉES À MARMOTTAN

Le musée Marmottan sert d'écrin à une agréable visite à la famille Bonaparte et plus précisément aux trois sœurs de Napoléon : Élisa, Pauline et Caroline. Trois filles dont le destin est entièrement modelé par l'aventure extraordinaire de leur frère, Napoléon, qui leur offre gloire, fortune et pouvoir en Italie.
Sur les huit enfants de la fratrie Bonaparte, elles sont respectivement au 4ème, 6ème et 7ème rang.



Élisa, née en 1777, sera pensionnaire de la maison de Saint-Cyr, où elle recevra une éducation raffinée qui lui permet de tenir un salon littéraire réputé à Paris pendant le Consulat. Son mariage avec Félix Baciocchi, simple officier corse (!) déplaît à Napoléon.

Mais celui-ci sait apprécier les grandes qualités et la force de caractère de sa sœur en lui offrant le grand-duché de Toscane. Élisa mènera une action politique, calquée sur celle de son impérial frère et jouera un rôle important de mécène pour des artistes italiens.



Pauline, née en 1780, est la plus proche de Napoléon en dépit de la différence d'âge de 11 ans qui les sépare. Tous ses contemporains s'accordent sur sa remarquable beauté qui charmera en premier lieu le général Leclerc qu'elle épouse. Son tempérament ardent s’accommode mal des fréquentes absences de son mari au grand dam de son frère qui se débat dans ses propres déboires conjugaux avec Joséphine. Veuve en 1802, Napoléon lui trouve rapidement un époux à sa convenance : le prince Camille Borghèse. Elle partage son temps entre Paris, le plus souvent et Rome. Elle mène grand train dans ses somptueuses résidences, affole la cour des Tuileries par sa coquetterie. Le sculpteur Canova dévoilera ses charmes pulpeux en la représentant sous les traits de Vénus victorieuse mais seuls les proches du prince Borghèse auront le bonheur de la contempler !

Caroline, née en 1782, pendant la période de grande pauvreté de la famille Bonaparte demandera toute la science et la patience de Mme Campan, ancienne femme de chambre de Marie-Antoinette et future directrice de la maison de la Légion d'Honneur, pour peaufiner ses manières et lui donner une éducation digne du rang qu'elle a à tenir. Elle épouse en 1800 le flamboyant général Joachim Murat, aussi ambitieux et assoiffé d'honneurs qu'elle-même. Altesse impériale, grande-duchesse de Berg et enfin reine de Naples, Caroline est une femme de goût et elle attire à sa cour de nombreux artistes, savants et hommes de lettres. C'est aussi une mère de famille attentive comme en témoignent les nombreux portraits de famille.



De Florence à Paris, de Naples à Rome, les magnifique résidences des trois sœurs témoignent de leur goût et de l'impulsion qu'elles ont donné à l'art sous toutes ses formes : peinture, sculpture, joaillerie, porcelaine tous les arts somptuaires bénéficient de leurs commandes. C'est un plaisant voyage, le feuilletage d'une revue mondaine sur papier glacé, un peu clinquant mais aussi plein de charme, un kaléidoscope qui nous révèle des facettes méconnues de la grande épopée napoléonienne, loin des champs de bataille et des luttes politiques.

www.marmottan.fr

mercredi 9 octobre 2013

QUE PLEIN DE MALALA SE LÈVENT !

Il y a un an, Malala prenait une balle dans la tête, son car scolaire étant pris d’assaut par les talibans de la vallée de Swat, où elle vivait. Elle était facile à identifier car elle refusait de porter la burqa. Voilà « l’ennemi » des talibans, et vendredi, cette adolescente, qui a survécu et repris son combat, recevra peut-être le prix Nobel de la paix.
Sa voix, un peu métallique, a retenti toute la semaine sur les ondes de France Inter :
One child, one teacher, one book, one pen can change the world.
Les femmes qui lisent sont dangereuses, paraît-il. À l’aune des méfaits accomplis par des hommes qui ne lisent pas, il est urgent d’envoyer toutes les filles à l’école, les dégâts seront moindres. Jamais une femme n’a eu l’idée de cacher son homme sous un quelconque vêtement !

Pour mémoire : il y a 20 ans, Taslima Nasreen, originaire du Bangaldesh (ex Pakistan oriental), médecin et écrivain, était soumise à une fatwa émanant des musulmans intégristes de son pays qui la contraindra à l’exil. La fatwa n’a jamais été levée et la haine obscurantiste qui la menace reste vivace dans le monde musulman, même si elle est le fait d’une minorité.

mercredi 2 octobre 2013

BRAQUE AU GRAND PALAIS


Je pourrais vous dire le plus grand bien de cette exposition, très complète sur l’œuvre de Braque, sur la qualité du parcours proposé, avec quelques bémols sur des salles ou panneaux de moindre intérêt ; je pourrais évoquer la richesse de la documentation photographique et littéraire mais vous trouverez tout cela sur place... En visitant cette exposition me sont venues quelques interrogations : pourquoi Braque, qui eut droit à des obsèques nationales et à un éloge funèbre écrit et lu par André Malraux, reste-t-il dans l’ombre de Picasso ? Deux géants de la peinture Picasso et Matisse se sont « affrontés » durant de longues années avec, chez Picasso de façon évidente, un don remarquable pour la communication. Braque serait-il la « victime » de cet affrontement ? Cette exposition est l'occasion de lui rendre sa place parmi les monstres sacrés et l'hommage est magistral.

  • Le cubisme

La recherche initiée dès 1907 sur la déconstruction des formes du réel et la mise en place sur un support en deux dimensions, la toile, d’un objet en trois dimensions succède au travail entrepris sur la couleur après la révélation que fut la salle « fauve » du Salon d’automne de 1905 où "La Femme au chapeau" de Matisse, telle un manifeste, faisait claquer ses couleurs sans respecter les règles établies ! La recherche se lit dans les influences que l’on sent dans certains tableaux d’avant 1910 : la couleur traitée en grands aplats vifs à la manière fauve ou bien des touches rapides et contrastées ou complémentaires plus proches d’un Van Gogh ; la géométrisation des formes comme Cézanne et son souci de traiter « la nature par le cylindre, la sphère ou le cône ». Commencent alors des années de travail intense avec Picasso à l’Estaque sous le regard attentif ou hostile des critiques et des marchands d’art, dans une telle osmose que leurs œuvres semblent interchangeables. C’est une toile de Braque qui inspirera le nom de cubisme et dans un deuxième temps en poussant les recherches de Cézanne jusqu’à l’éclatement de la forme, Braque se tournera vers la nature morte, délaissant le paysage et la couleur pour arriver à la limite de l’abstraction. Puis par la réintroduction d’éléments ramenant la réalité figurative comme les papiers, les lettres ou mots en grands caractères et en simplifiant les formes.

  • L'après-guerre et les années 30

Le travail avec Picasso est terminé, les formes s’arrondissent, s’entrechoquent moins violemment, la couleur revient : les natures mortes « Guéridons » et « Cheminées » semblent plus évidentes, plus lisibles ce qui n’ôte rien à la profondeur des recherches poursuivies pour déstructurer la réalité. Les année 30 verront la collaboration fructueuse avec les éditeurs d’art : La Théogonie d’Hésiode commandée par Vollard est un éblouissement : des gravures au trait parfaitement maîtrisé, une vivacité des compositions et le plaisir de la calligraphie grecque qui se joint au retour de la forme humaine, épurée mais vigoureuse.


  • La consécration

Deux oiseaux sur fond bleu (1963)
Après 1945 le retour des séries « Billards » puis « Ateliers », lieux de la création par excellence, offre un assemblage des formes et des objets qui ont nourri l’œuvre de Braque, dans un désordre apparent qu’il ouvre vers l'envol en y plaçant un oiseau blanc. La commande de Malraux, ministre de la Culture, pour le plafond de la salle des Sept Cheminées du Louvre est liée à ce thème de l’oiseau en plein vol, œuvre maîtresse d’un artiste qui a force de « tripoter » (comme il l’a écrit) la matière parvient à la plénitude. Le billard comme brisé semble s’envoler par la fenêtre, le « portrait » de l’oiseau s’apprête à repartir à tire d’aile vers le ciel bleu d’un plafond du Louvre.

Peindre était pour Braque un engagement absolu et périlleux qu’il définissait ainsi : « L’art est une blessure qui devient lumière ». L’harmonie est à ce prix mais au fil du travail et de la recherche, les éléments concrets « s’effacent pour ne laisser que l’empreinte et l’écho de leurs poétiques rapports. Mon travail s’illuminait, m’illuminait. Tout devenait simple et profond ».


Pour compléter : le texte de Malraux en septembre 1963
À la mémoire de Georges Braque
Hommage du Gouvernement par M. Malraux, ministre d'État, chargé des affaires culturelles

Colonnade du Louvre, le 3 septembre 1963


Avant que Georges Braque repose dans le petit cimetière normand qu'il a choisi, j'apporte ici l'hommage solennel de la France.
Vous avez reconnu, Madame, la musique que vous venez d'entendre, avant ces cloches qui sonnaient jadis pour les rois : c'est la Marche Funèbre pour la Mort d'un héros. Jamais un pays moderne n'a rendu à un de ses peintres morts un hommage de cette nature. L'histoire de la peinture qui trouve dans l'œuvre de Braque un accomplissement magistral a été une longue histoire de dédains, de misère et de désespoir. Et jusque par sa mort, Braque semble assurer la revanche des pauvres obsèques de Modigliani, du sinistre enterrement de Van Gogh ?... Et puisque tous les Français savent qu'il y a une part de l'honneur de la France qui s'appelle Victor Hugo, il est bon de leur dire qu'il y a une part de l'honneur de la France qui s'appelle Braque - parce que l'honneur d'un pays est fait aussi de ce qu'il donne au monde.
Ses tableaux se trouvaient dans tous les grands musées, et plus de cent mille Japonais, à Tokyo, s'étaient rendus à son exposition comme à un pèlerinage. Dans son atelier qui n'avait connu d'autre passion que la peinture, la gloire était entrée mais s'était assise à l'écart, sans déranger une couleur, une ligne, ni même un meuble. Silencieuse et immobile comme les oiseaux blancs qui depuis sa vieillesse avaient apparu sur ses toiles. Il était devenu l'un des plus grands peintres du siècle.
Mais notre admiration ne tient pas seulement à ce génie pacifié que connaissent tant de maîtres à l'approche de la nuit. Elle tient aussi au lien de ce génie avec la révolution picturale la plus importante du siècle, au rôle décisif joué par Braque dans la destruction de l'imitation des objets et des spectacles. Et sans doute le caractère le plus pénétrant de son art est-il de joindre, à une liberté éclatante et proclamée, une domination des moyens de cette liberté, sans égale dans la peinture contemporaine.
De plus, en nous révélant, avec une puissance contagieuse, la liberté de la peinture, Braque et ses amis de 1910 nous révélaient aussi tout l'art du passé rebelle à l'illusion depuis notre peinture romane jusqu'au fond des siècles : patiemment ou rageusement penchés sur leurs tableaux insultés. Ces peintres ressuscitaient pour nous tout le passé du monde...
Enfin, ces tableaux exprimaient la France à l'égal de ceux de Corot - mais plus mystérieusement, car Corot, lui, l'avait beaucoup représentée. Braque l'exprimait avec une force de symbole si grande qu'il est aussi légitime chez lui au Louvre, que l'ange de Reims dans sa cathédrale. Samedi, nous avons retrouvé une tristesse très lointaine mais bien connue; celle qui nous avait saisis naguère quand nous avions entendu : "Debussy est mort".

Demain matin, Madame, que l'on dise aux marins et aux cultivateurs de Varangeville, qui aimaient Georges Braque, évidemment sans comprendre son art : "Hier, quand il était devant le palais des rois et le premier musée du monde, il y avait dans la nuit pluvieuse une voix indistincte qui disait merci ; et une main très simple, une main usée de paysanne, qui était la main de la France, et qui se levait une dernière fois dans la nuit pour caresser doucement ses cheveux blancs".

mardi 1 octobre 2013

LES AVANT-GARDES du 20ème siècle (1)

  • Petit rappel

La révolution impressionniste, première « avant-garde » = mouvement artistique novateur et qui manifeste une volonté déterminée de s’affranchir des règles établies.

Monet (1841-1926)
-Les séries : cathédrales, meules de foin, rochers… cette manière de travailler est utilisée par Monet et lui permet de fixer sur la toile par petites touches de couleur juxtaposées, en harmonisant ou opposant couleurs primaires et complémentaires, un instant fugitif qui modifie sa perception de la réalité.
-La modernité, l’économie et la société des pays européens : la Révolution industrielle et l’urbanisation très rapide qui l’accompagne transforment en profondeur la vie sociale ; cette atmosphère est aussi présente chez les impressionnistes.

  • Des artistes inclassables

Cézanne, Gauguin et Van Gogh ouvrent des voies nouvelles et relancent la réflexion et la recherche esthétique.

-Cézanne, meurt en 1905, son œuvre aura une influence déterminante sur les cubistes :
Traitez la nature en termes de sphère, de cône, de cylindre.
« Il n’y a pas de lignes, il n’y a pas de modelé, il n’y a que des contrastes. Ces contrastes, ce ne sont pas le noir et le blanc qui les donnent, c’est la sensation colorée. »
-Gauguin, ouvre la voie au fauvisme en utilisant la couleur sans se soucier de la réalité en grands aplats, et aux contrastes violents.
-Van Gogh fragmente les surfaces, crée les volumes avec sa touche rapide et tourmentée, une peintures où le monde vibre de son mal-être, en ce sens il se rattache au courant expressionniste, plus présent en Europe du Nord.

  • L’expressionnisme dès 1890, très présent en Europe du Nord

-Edvard Munch (1863-1944)
Le Cri ; Le Baiser
-Otto Dix (1891-1969)
Carnets de dessins de la guerre de 14-18
La Guerre (tryptique) ; Rue de Prague

  • Le fauvisme le choc de la couleur pure

Le portrait de Mme Matissse fait hurler la plupart des amateurs et la quasi-totalité des critiques d’art : « Donatello chez les fauves !! »
-Henri Matisse (1869-1964)
-Maurice de Vlaminck (1876-1958)

  • Vers le cubisme

Nombreux facteurs convergents comme la 1ère rétrospective de Cézanne ; de multiples rencontres entre Montmartre et Montparnasse, du Bateau-Lavoir de Picasso à l’atelier de Foujita ; ouverture à Paris et à Barcelone de musées d’art primitif.
La réalité pulvérisée : la rencontre Braque / Picasso a lieu par l’intermédiaire d’Apollinaire.

Le cubisme analytique :
Priorité de la forme sur la couleur.
Refus total du système illusionniste hérité de la Renaissance.
Multiplication des points de vue et fragmentation de la réalité.
Aucun contenu psychologique.

Le cubisme synthétique :
1912 : orientation vers une synthèse des formes et des couleurs.
Synthèse des techniques et des matériaux (papiers collés) :
Exprimer la réalité avec des matériaux. G. Braque
On peut peindre avec ce qu’on voudra. P. Picasso
Georges Braque (1882-1963) : l’alter ego, travail en symbiose et réflexion très approfondie sur la déstructuration de surfaces.

  • Un peu de sculpture

-Pablo Gargallo (1881-1934)
Le Prophète ; Famille
-Ossip Zadkine (1890-1967)
L’Arlequin
-Constantin Brancusi (1878-1957)
Le Baiser ; Muse endormie ; Oiseau

Évolution aussi vers un art non-figuratif.

  • Courants de peinture « collatéraux »

L’Orphisme : couleurs et harmonies.
-Robert Delaunay (1885-1941)
Hommage à Blériot (1914)
-Sonia Delaunay (1885-1979)
Loi du contraste simultané des couleurs, théorie sur la diffraction de la lumière, cercle chromatique utilisés pour obtenir des vibrations colorées.
Sonia Delaunay parle de composition, d’harmonie, d’accords, de dissonances.

Marcel Duchamp (1887-1968)
Hors norme !!!
Figure incontournable de l’art et de la réflexion théoricienne sur le statut de l’œuvre d’art. Reste une référence pour tous les artistes de la deuxième moitié du 20ème siècle. Suscite toujours la polémique.
Nu descendant l’escalier (1921)

Le Futurisme : rythme et mouvement.
-Carlo Carrà (1881-1966)
Portrait de Marinetti (homme de lettres italien, auteur du Manifeste du Futurisme) (1914) ;
-Umberto Boccioni (1882-1916)
Formes uniques de la continuité de l’espace (1912)

Apports de la chronophotographie et du cinéma.
Posture idéologique agressive, anti-bourgeois, anti-culture, misogyne...

7. Il n'y a plus de beauté que dans la lutte. Pas de chef-d'œuvre sans un caractère agressif. La poésie doit être un assaut violent contre les forces inconnues, pour les sommer de se coucher devant l'homme.
8. Nous sommes sur le promontoire extrême des siècles !... A quoi bon regarder derrière nous du moment qu'il nous faut défoncer les vantaux mystérieux de l'Impossible? Le Temps et l'Espace sont morts hier. Nous vivons déjà dans l'absolu, puisque nous avons déjà créé l'éternelle vitesse omniprésente.
9. Nous voulons glorifier la guerre -seule hygiène du monde, -le militarisme, le patriotisme, le geste destructeur des anarchistes, les belles Idées qui tuent, et le mépris de la femme.
10. Nous voulons démolir les musées, les bibliothèques, combattre le moralisme, le féminisme et toutes les lâchetés opportunistes et utilitaires."

Extrait du Manifeste du Futurisme, Marinetti (1909)

  • Vers l’abstraction

Naissance juste avant 1ère guerre mondiale.
Pionniers : Mondrian, Malévitch, Kandinsky.
Se développe dans toute l’Europe dans les années 1920-1930, sous des formes diverses.
Après 1945, devient un phénomène mondial.

-Paul Klee (1879-1940)
Abstrait avec des souvenirs
-Piet Mondrian (1872-1944)

Un cheminement pictural vers le non-figuratif.
(Dans le passé : Pieter de Hooch, le Siècle d’or néerlandais, Vélasquez : Les Ménines, Picasso)

-Malévitch : le suprématisme, une impasse ?
Carré blanc sur fond blanc = mort de la peinture ?

Retour vers le figuratif (et l’Italie), par le chemin de notre inconscient.
-Chirico et les peintres métaphysiques italiens.
La pintura è una cosa mentale, Léonard de Vinci
Langage ésotérique pour décrire un univers onirique, accessible par certaines techniques.

  • Le surréalisme, une méta-réalité

-Tzara et le mouvement DADA, né en Suisse pendant la guerre.
-Raoul Hausmann

Le surréalisme est avant tout un mouvement littéraire (chef de file André Breton) mais qui s’étend aux autres domaines plus modernes comme la photographie et le cinéma. Utilise les travaux de Freud et Jung sur l’inconscient et les techniques pour le faire émerger.

-Man Ray
Le Violon d’Ingres
-Salvador Dali (1904-1989) un monument à lui tout seul !
-Marcel Duchamp : READY – MADE ? Où est l’œuvre ?
-René Magritte (1898-1967) : et l’humour ?
Le terme de composition suppose une décomposition possible sous forme d’analyse par exemple.
Dans la mesure où mes tableaux sont valables, ils ne se prêtent pas à l’analyse.
Ceci n’est pas une pipe
La Reproduction interdite
Madame Récamier

ALLEMAGNE 1937 : succès de l’exposition de J. Goebbels sur l’art dégénéré.

  • La rupture de la Seconde Guerre Mondiale

Après 1945, le monde de l’art connaît un foisonnement considérable et la recherche artistique et esthétique explore des voies très diversifiées.
L’œuvre d’art est de moins en moins accessible sans une connaissance préalable de la démarche de l’artiste et devient en outre une marchandise et un objet de spéculation.
L’art contemporain est un univers très complexe où se côtoient l’art et sa propre négation. Tous les supports et media modernes sont utilisés et détournés.
L’artiste et ses interrogations tendent à devenir le seul sujet de l’œuvre avec le risque d’aboutir à une impasse car l’art a besoin du regard et du ressenti de l’autre pour exister.